EDA #6 - Louise Rhodde (M1 Droit de l'UE-Erasmus)

Le 06/07/2021
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Perdu dans votre orientation ? Vous n’avez pas d’idée de master, vous ne savez pas quoi faire après la double licence ? Ou vous avez des idées sans savoir précisément de quoi il en ressort ? L’ADPH sort une série d'articles sur l’orientation des anciens droits-philos pour répondre à toutes vos questions.

 

Aujourd'hui, c'est Louise Rhodde, de la promotion 2018, qui a accepté de répondre à nos questions.

Peux-tu présenter ton parcours ?

 

J’ai fait un bac S, puis une première année de prépa véto-agro. Après 3 ans de double licence Droit/Philosophie, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire, donc pour ne pas me fermer de portes j’ai fait une demande d’Erasmus en droit européen, en anglais et aux Pays-Bas. J’ai été prise dans une petite université, l’Université de Radboud. Je suis rentrée plus tôt que prévu, en mars, et j’ai réussi à m’arranger pour terminer l’année à Lyon 3. Après avoir validé mon master, je ne savais toujours pas vraiment ce que je voulais faire.

J’ai fait le choix de beaucoup m’investir dans Youth for Climate, que j’ai lancé à Lyon 3. Je me suis beaucoup investie dans l’association.

J’ai intégré le master RISE, dans lequel nous sommes mélangés entre juristes, ingénieurs, etc. J’ai fait mon stage au Cerema, un établissement public d’expertise d’accompagnement et de recherche sur les questions de mobilités, risque, environnement et aménagement pour les collectivités territoriales, sur le sujet de la résilience territoriale. J’ai obtenu un CDD pendant 3 mois sur le terrain, puis j’ai travaillé en tant que cheffe de projet résilience, pour rendre opérationnels ces projets-là.

 

Pourquoi avoir choisi ce master ?

 

J’aime bien tout, je ne voulais pas m’enfermer : l’intérêt du master RISE est qu’on a des cours d’éco, ou de psychologie et sociologie des risques notamment. J’ai pu retrouver un peu de philosophie et pas juste du “juridico-juridique”.

Ce master fait comprendre qu’on est dans des problématiques systémiques, qu'on ne pourra pas résoudre la question environnementale sans la question sociale, etc. Ça m’a permis d’avoir une approche assez holistique, ça questionne sur notre rapport au monde. Le droit de l’environnement est une matière qui est vouée à être générale. C’est un droit qui initialement était construit comme du droit public, mais finalement ça mêle également du droit pénal, du droit de la CEDH, etc.

Ce qui est intéressant c’est que j’ai cet aspect pluridisciplinaire : question de psychologie des risques, investissement citoyen, gestion des risques, économie, politique, etc.

 

Suite à ton master, tu as réussi à rentrer sans difficulté dans ce milieu qui mêle économie, ingénierie, … ? Ça semble technique.

 

En France, on a une vision selon laquelle pour tel métier il faut faire telles études, pour acquérir telles compétences, etc. Mon Erasmus m’a beaucoup fait réfléchir à cela : on y parlait de « capacités » plus que de compétences. En double licence, j’ai moins appris le contenu du droit que les grandes logiques, les grandes dynamiques du droit, comment réfléchir, argumenter, etc. Ce que nos études nous apprennent c’est plus que des connaissances, c’est des savoirs-faire et savoirs-être.

Je ne fais pas un travail d’ingénieur non plus. Je travaille sur du projet de territoire, donc ça correspond à des études de sciences politiques, de développement territorial, etc. Mais la différence entre une DP et un cursus sciences politiques n’est pas forcément conséquente.

 

Qu’est-ce que la droit-philo t’a apporté ?

 

La double licence spécifiquement m’a appris à travailler à plusieurs, à bien m’exprimer et argumenter à l’oral par exemple. Elle m’a aussi fait comprendre que le droit est un moyen au service d’autre chose.

 

 

Peux-tu nous parler un peu de ton expérience Erasmus ? 

 

Concernant la procédure d’échange, le personnel administratif a été plutôt réactif et aidant. Les réunions dédiées à l'échange ont été plutôt bien construites. De plus, lorsque j’ai voulu réintégrer mon master à Lyon en cours de mon année d’Erasmus, l’administration s’est montrée compréhensive.

Sur l’échange en lui-même, je me suis retrouvée un peu isolée. Je voulais en priorité tisser des relations solides, ce qui reste compliqué, en pratique. Ce qui a aussi rendu mon intégration plus difficile, c’est que je n’ai pas pu participer à la semaine d’intégration non plus.

Au niveau du logement, j’étais dans une résidence avec plein d’étrangers, mais ils n’étaient, pour la majorité, pas là dans le cadre du programme Erasmus, donc ils avaient beaucoup plus de cours que moi et réussissaient à avoir un esprit de promotion, ils avaient leur groupe à eux. Alors que de mon côté, je n’avais que quelques heures de cours par semaine (il y avait des semaines où je n’avais cours que sur deux jours !) et je ne me retrouvais jamais avec les mêmes personnes, parce qu'en tant qu’étudiant Erasmus, tu n’es pas intégré dans une promotion, ce qui favorise aussi l’isolement. Pour compenser, j’ai dû trouver d'autres sources de socialisation en dehors de l’université, je me suis inscrite à une chorale, je me suis mise à la photographie… Mine de rien, cette expérience, même si elle peut être vue comme négative, m'a beaucoup appris sur moi et finalement m’a permis de me désinhiber ; ça m’a donné l’envie et l’énergie de m’investir dans le monde associatif quand je suis rentrée en France. En ayant été dans une situation qui m’a forcée à sortir de ma zone de confort, cela m’a permis de prendre les devants et de devenir plus à l’aise dans ma prise de parole.

 

Le passage à l’enseignement en anglais n’a pas été trop brutal ?

 

Lorsque l’on est baigné dans une langue, on ne lit que ça et l’on entend que ça, donc la transition se fait très naturellement. Ça a été dans la continuité, parce que tu apprends déjà tout directement en anglais donc tu n’as pas besoin de tout traduire. En plus, les professeurs restent bienveillants et tiennent compte du fait que ce n’est pas ta langue maternelle. Mais sinon, ce qui change beaucoup, c’est que l’enseignement là-bas est beaucoup plus orienté sur la pratique que sur la théorie. Les cours ressemblent plus à des TD qui vont au-delà du cours, pour se former professionnellement. Ce qui demande de travailler beaucoup tes cours en autonomie car il n’y a pas de CM, tout est dans les manuels. Par exemple, pour un de mes cours nous devions plaider comme si nous étions à la CEDH. Tout se joue beaucoup sur l’oral et la méthode d’enseignement est interactive.

 

 

Recommanderais-tu ta destination ? 

 

Initialement, l’université de Radboud n’était pas mon premier choix. Néanmoins, j’en ai été très contente, tu te retrouves dans un endroits pas très connu, mais très tranquille. Étant donné que l’université a un budget beaucoup plus conséquent qu’en France, tu as accès à des services de haute  qualité. Cette destination est aussi une occasion de rencontrer des natifs, et de voir réellement la vie du pays, au lieu d’aller dans des endroits trop touristiques.

 

Qu’est-ce que tu retiens de ton expérience Erasmus ? 

 

Il ne faut pas forcément partir en se disant que tout sera parfait, en idéalisant, se disant que ce sera la meilleure année de sa vie, qu’on rencontrera plein de gens. Des fois, la réalité peut être toute autre. Il faut ne pas avoir peur de l’échec, si finalement ce n’est pas aussi génial que prévu. Ça n’apporte pas obligatoirement les choses auxquelles on pensait, mais quoiqu’il arrive, on en retient beaucoup. Vouloir rentrer, même si c’est compliqué et très exceptionnel, ce n’est pas si grave.

Mais je n’exclus pas l’idée d’aller travailler à l’étranger un jour, si l’opportunité se présente !

 

Comment est perçu ton engagement associatif dans ta formation et dans le milieu professionnel ? 

 

L’engagement reste dans la plupart des cas fortement valorisé, là encore c’est aussi très dépendant de la vision des directeurs de master. Pour mon master RISE, leur objectif était de recruter un maximum de profils différents, tout ce qui permet de te démarquer est très bien vu. Également, les questions sur l’environnement sont pluridisciplinaires : cela nécessite d’avoir un profil ouvert. Lorsque je me suis investie dans Youth for climate, j’ai quand même délaissé un peu plus mon master, mais cet engagement m’a énormément apporté en prise de contacts. J’ai pu assister à des réunions à Paris, avec des personnalités importantes travaillant sur les problématiques environnementales.

Quant à mon engagement dans l’association LYF (Lyon Young Film), c’est un plus, car c’est un investissement plus neutre politiquement, ce qui me permet de plus facilement le mettre en avant.

Quoiqu’il arrive, chaque expérience est bonne a prendre pour les candidatures, le tout est surtout de bien savoir les valoriser et montrer tout ce qu'elles nous ont apporté.

 

Ton master t'a-t-il permis d’obtenir des contacts dans le monde professionnel ? 

 

Dans le cadre de mon master, j’ai pu avoir des liens avec des gens d’autres écoles, ce qui n’est pas négligeable, car, ça permet pour plus tard d’avoir des contacts dans plusieurs corps de métiers au sein de mon domaine. Aussi, certains cours sont délivrés par des professionnels, ce qui ouvre une première porte dans le monde du travail. Beaucoup de projets de groupe sont évalués par des professionnels. On monte des cycles de conférences de A à Z dans le cadre du master. De la thématique, jusqu’à trouver les intervenants ou encore gérer la communication … C’est une occasion de faire connaître le master et aussi d’être en lien direct avec des professionnels. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai découvert l’organisme dans lequel je travaille actuellement.  

Pour les stages à effectuer en master, en général, les professeurs de ton master t’aident (cela varie en fonction de leur investissement). Tu peux aussi trouver en te mettant en lien avec les anciens étudiants.

 

Comment as-tu réussi à te rendre compte de ce que tu voulais faire ? As-tu eu un déclic te faisant comprendre que tu voulais absolument exercer ce métier ? 

 

On a souvent une vision biaisée des métiers. A la base, les collectivités territoriales ne m'intéressaient pas du tout, mais dans la pratique le regard change beaucoup. Pour trouver ton métier, une grosse partie se joue aussi sur le type de métier que tu voudrais avoir : être plus dans l’argumentation, travail en équipe, être dans un milieu intellectuel, avoir du temps libre, …

Après, pour ma part, je me suis laissée porter. J’ai fait un stage sur la résilience, et à la fin, je sentais que je n’avais pas épuisé le sujet : j’ai donc saisi l’occasion de pouvoir continuer à travailler dans l’organisme. Ça m’a permis de rentrer dans le monde du travail sans m’en rendre compte. Mais, ça ne veut pas dire que mon parcours est figé et que je voudrai faire ça toute ma vie. Pour l’instant, c’est enrichissant. J’avise au fur et à mesure.

Nos besoins évoluent au cours de la vie, ce qui nous fait naturellement bouger. Il ne faut pas attendre une révélation, mais essayer, c’est la seule façon de voir ce qui nous plait. Il faut se laisser porter dans la voie où tu sens que tu veux aller. Il n’y a pas de mauvais choix, mais que des choix que l’on arrive plus au moins à assumer.

Avant, l’orientation me stressait beaucoup, maintenant je me sens plus apaisée sur ces questions. J’ai enregistré que le choix n’est pas absolu. On arrive jamais à projeter exactement ce qui nous attend. Par exemple, quand on est arrivé en Droit-Philo on avait tous des attentes différentes de la réalité. Ça nous apporte toujours des choses inattendues.

Il ne faut pas avoir peur de ne pas avoir un parcours linéaire, on peut accéder à beaucoup de métiers par de multiples portes d’entrée. N’hésitez pas à échanger avec les gens du métiers, ça démystifie le monde du travail. On se rend vite compte qu’il n’y a pas de parcours unique.

 

 

Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux étudiants actuels de Droit-Philo ? 

Déjà, il faut se déculpabiliser. Ce n’est pas grave d’être perdu. On peut avoir de multiples occasions de changer d’avis sur son orientation. La double-licence reste une bonne base. Notre formation est bien vue par la plupart des recruteurs. Ce qui compte, c’est aussi de savoir se vendre. Souvent on ne prend pas conscience de tout ce que l’on a appris, surtout comme compétence de savoir-être et de savoir-faire. N’hésitez pas à aller regarder des masters en dehors des facultés purement droit. Il y en a plein auxquels on ne pense pas comme dans les masters de Sciences Po, agro Paris tech (pour le développement durable ), …

Il ne faut pas paniquer, rien n’est fatal, on fait au mieux avec les éléments que l’on a.

 

POUR CONTACTER LOUISE : 

N'hésitez surtout pas à la contacter par mail pour toutes informations supplémentaires, ou la moindre question: louise.rhodde@gmail.com